L'institut Montaigne a récemment publié une enquête qu'elle a commandée et réalisée avec l'institut de sondage Kantar Public auprès de salariés français sur leur vision du travail.

Méthodologie

L'enquête a été réalisée de mi-septembre 2022 à début octobre 2022 auprès d'un panel de 5000 actifs environ.

Les quotas utilisés pour inférer les résultats à la population sont le sexe, l'âge, la CSP, la région et le type d'agglomération.

Tous les types d'actifs ont été interrogés : salariés du privé, salariés du public et indépendants.

Un questionnaire de plus de 60 questions, d'une durée de 20 minutes maximum et autorempli par l'enquêté.

Les thématiques de l'enquête

Au travers du questionnaire, 5 thématiques ont été choisies par l'Institut Montaigne.

  • La satisfaction au travail et ses déterminantes
  • La durée, la charge, les pénibilités du travail
  • Le télétravail
  • La fin de carrière et la retraite
  • L'évolution et la mobilité professionnelle

L'équipe Nicoka vous propose d'observer ensemble les résultats issus de ces différentes thématiques.

Vous pouvez retrouver nos trois premiers articles sur la satisfaction au travail et ses déterminante, la charge de travail ressentie, et sur le télé-travail.


Nous vous présentons aujourd'hui dans ce 4ème volet la thématique sur la fin de carrière et la retraite. 

La fin de carrière et la retraite : un rejet massif et collectif

L'enquête réalisée par l'Institut Montaigne met en évidence les opinions des travailleurs français concernant l'âge de la retraite et explore les dynamiques collectives qui influencent ces opinions. Bien qu'une très faible minorité (7%) considère l'âge de départ actuel comme insuffisant, une majorité relative (49%) le juge déjà excessif. Cette tendance transcende les catégories habituelles, indiquant ainsi une crise politique plus profonde que la simple question des retraites.

Des facteurs individuels liés à ce rejet

Certains facteurs d'insatisfaction au travail favorisent les opinions les plus hostiles à la réforme en cours. L'insatisfaction liée au temps de travail, aux perspectives de carrière, à l'autonomie, à l'équilibre professionnel et personnel, à l'impossibilité de pratiquer le télétravail et à la pénibilité physique sont cités comme des éléments contribuant à considérer l'âge de départ actuel comme excessif.

Volonté des travailleurs français

Face à la perspective inévitable d'un recul de l'âge de départ à la retraite, les travailleurs font preuve d'un certain pragmatisme. Une proportion significative (41%) exprime le souhait de bénéficier de conditions de travail aménagées quelques années avant le départ à la retraite. Cela ouvre la voie à des aménagements de fin de carrière tels que le cumul emploi retraite, les congés de fin de carrière et les retraites progressives, tant au niveau des entreprises que des branches professionnelles. 


Une majorité relative des salariés exprime le souhait de partir à la retraite de manière anticipée, même avec une pension réduite. Cette aspiration soulève la question de l'impact financier d'un nouvel allongement de la durée de cotisation sans relèvement de l'âge minimum légal. Il est suggéré que cela pourrait entraîner de nombreux départs précoces avec une pension réduite, diminuant ainsi le rendement financier de la réforme.


Selon les enquêtes annuelles de la DREES, l'âge de départ en retraite considéré comme "idéal" recule en raison des réformes du système de retraite depuis 2003, ce qui est cohérent avec le recul de l'âge de départ effectif. Ce recul de l'âge idéal est également observé au fil du temps au sein d'une génération spécifique. Par exemple, pour les personnes nées entre 1965 et 1969, l'âge idéal était en moyenne de 54,8 ans lorsqu'elles avaient entre 30 et 34 ans, mais il a atteint désormais un peu plus de 61 ans pour cette même génération.

L'aménagement des fins de carrière

Une minorité significative de salariés se dit prête à travailler moins ou à occuper des fonctions différentes, même avec une rémunération réduite. Cette attitude pragmatique offre des opportunités pour des aménagements de fin de carrière au niveau de l'entreprise et des branches professionnelles. Pour favoriser ces initiatives, il serait nécessaire d'adapter les incitations fiscales et sociales et de les cibler sur les travailleurs et les entreprises rencontrant le plus de difficultés. De plus, il est crucial que les partenaires sociaux s'engagent réellement sur la question de l'emploi des seniors, à tous les niveaux, que ce soit dans les branches ou les entreprises.


Les salariés souhaitant un aménagement des conditions de travail en fin de carrière ont généralement une ancienneté d'au moins 15 ans et ne prévoient pas de changer de poste. D'autres facteurs explicatifs incluent une augmentation de la charge de travail au cours des 5 dernières années et/ou une charge psychique élevée.


L'enquête révèle qu'il existe un refus massif de prolonger la vie active parmi les travailleurs français, mais également un rapport pragmatique envers la fin de carrière et la retraite. Cela suggère que de nombreux travailleurs ne souhaitent pas travailler au-delà de l'âge légal de la retraite, mais ils sont prêts à adopter une approche adaptée pour gérer cette transition.


Ce rapport pragmatique pourrait être lié à l'équilibre entre le désir de profiter de la vie après la retraite et la nécessité de garantir une sécurité financière. Les travailleurs français semblent être conscients de l'importance de préparer leur retraite et d'assurer leur bien-être financier à long terme. Cela pourrait expliquer leur attitude réaliste à l'égard de la fin de leur carrière et de la période de retraite. 

Sources

Enquête Institut Montaigne : Les Français au travail : dépasser les idées reçues

Enquête Drees 2022 : Les opinions et les souhaits en matière de retraite

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