Ce qu'il faut retenir du TalentLab Futur :


Jeudi 13 novembre, la toute première édition du TalentLab Futur avait lieu à Paris, un évènement imaginé par Laurent Brouat et porté par Les talents narratifs. Une journée entière consacrée à une question simple en apparence : Comment l'IA rebat les cartes du recrutement, du travail et des compétences ? 

Tout au long de la journée, des intervenants venus du recrutement, de la tech, de la data...ont partagé leurs expériences, leurs doutes et leurs convictions. 

Retour sur cette première édition : 

Le programme de la matinée : Quand l'IA transforme les pratiques du recrutement


Programme de la matinée du TalentLab Futur : interventions de David Arnoux sur l'impact de l'IA dans le recrutement, Vanessa Perillat sur la transformation du pôle recrutement chez SFEIR, Guillaume Dietrich sur la révolution IA chez GoJob et Julien Lesaicherre sur l'IA vocale en entretien.

Quand l'IA change les règles...et les joueurs

Cette slide introduit l’intervention de David Arnoux (Humanoidz & GenAI Circle) autour d’un thème central : l’IA bouleverse les règles du jeu et redistribue les rôles dans les organisations.
  • Intervention de David Arnoux (Fondateur de Growth Tribe et de GenAI)

La journée a démarré par l'intervention de David Arnoux, fondateur de Growth Tribe et aujourd'hui à la tête de plusieurs projets autour de l'IA (dont Humanoids)

Son message d'ouverture tient en une phrase : l'IA n'élimine pas la créativité humaine, elle l'amplifie.

Pendant des années, David a accompagné des équipes marketing, sales et produit dans leur transformation digitale et IA. Il pilote désormais des "entreprises augmentées" où une petite équipe humaine orchestre une armée d'agents IA : génération de contenu, campagnes marketing, service client, analyse de données... 

L'humain ne disparaît pas, il change de place : moins d'exécution manuelle, plus de rôle de rédacteur en chef, de stratège, d'arbitre du "bon goût". 

Pour illustrer cette mutation, il revient sur l'invention du métier à tisser Jacquard. Une innovation qui a déclenché des révoltes mais qui, à terme, a fait évoluer le métier de tisserand vers des fonctions à plus forte valeur : design textile, contrôle qualité, création de mode...

Selon lui, nous sommes aujourd'hui les "tisserands modernes" :

Slide comparant le métier de recruteur à celui de tisserand : une liste de tâches répétitives du recrutement moderne — sourcing LinkedIn, copier-coller d’informations, relances, mise à jour de tableaux, rapports, planification d’entretiens, évaluations, relances candidats, formatage d’offres d’emploi, statistiques, vérification de références et recherches booléennes. À droite, une image métaphorique montre une recruteuse travaillant sur un métier à tisser pour illustrer la dimension manuelle et laborieuse du recrutement sans automatisation.

Nous passons encore trop de temps à copier-coller, mettre à jour des tableaux, re-formater des offres, relancer des candidats...toutes ces tâches que l'IA sait déjà très bien absorber. 

David insiste aussi sur un point souvent oublié : ce n'est pas l'IA qui supprime des emplois, ce sont les décisions des directions. Il oppose deux visions : 

Articles de presse sur l’impact de l’IA dans le travail : un article NPR annonçant des licenciements chez Amazon liés aux investissements en intelligence artificielle, et un article JobsPikr expliquant comment Walmart reconvertit 50 000 caissiers en techniciens de drones et superviseurs de robots.

  • Celle d'Amazon, qui profite de l'IA pour réduire massivement les effectifs,
  • Celle de Walmart, qui choisit de reformer des dizaines de milliers de collaborateurs pour en faire des équipes augmentées. 

Même logique côté individus : 
  • Un état d'esprit figé comme : "c'est du buzz", "ça va prendre nos jobs", "on ne peut pas l'utiliser à cause du RGPD"...
  • Un état d'esprit de croissance comme : "comment je m'équipe ?", "sur quelles tâches je commence ?", "Comment je garde l'humain au centre ?"...
Concrètement, il propose une approche très opérationnelle : 
1. Auditer ses tâches : identifier ce qui est à faible valeur ajoutée VS ce qui est vraiment humain
2. Prioriser les cas d'usage : avec une matrice simple impact / facilité de mise en oeuvre.
3. Commencer petit : un cas d'usage à la fois, bien cadré, plutôt que vouloir tout transformer d'un coup. 
4. Rester aux commandes : tester d'abord par soi-même, puis laisser l'IA accélérer (méthode "centaure" : moitié humain, moitié machine).

Finalement, les équipes qui apprennent à "surfer la vague" seront celles qui créeront le plus de valeur demain. Les autres continueront à faire du tissage manuel dans un monde de métiers à tisser. 

Quand l'IA transforme un pôle recrutement : le cas SFEIR

Cette slide introduit l’intervention de Vanessa Perillat, consacrée à un sujet clé : réussir la transformation IA au sein d’une équipe de recrutement.

Chez SFEIR, société de serivces numériques spécialisée sur des profils très pénuriques (data, IA, cloud, développement applicatif), la question n'était pas de savoir si l'IA allait changer le recrutement, mais quand. La réponse a été : "pas dans dix ans, maintenant". En six mois, les équipes Talent Acquisition sont passées de 10% à 90% d'usage hedomadaire des outils IA. 

Pour Vanessa Périllat, l'IA ne change pas seulement notre façon de travailler, elle change surtout notre manière de penser. Elle propose une métaphore : Là où un outil classique ressemble à une casserole (une fonction précise), l'IA s'apparente plutôt à un chef à vos côtés qui vous suggère plusieurs recettes possibles à partir des mêmes ingrédients. Dans le recrutement, l'IA propose des stratégies, des formulations, des plans d'action, mais c'est toujours le recruteur qui tranche.

Son déclic personnel vient d'un recrutement difficile : brief flou, métier en tension, peu de temps disponible côté manager... En injectant les éléments dont elle disposait dans un outil d'IA, elle obtient :
  • Les zones à challenger auprès du hiring manager,
  • Des pistes de stratégie de sourcing, 
  • Des exemples d'annonces et de messages.
Elle réalise alors qu'elle n'a pas juste gagné deux heures : elle a gagné un coéquipier qui la pousse finalement à réfléchir plus loin. À partir de là, elle teste l'IA sur tout le cycle : messages d'approche, analyse de CV, préparation d'entretien, compte-rendu, brief de closing...

Le vrai sujet a été d'embarquer toute l'équipe. Vanessa s'appuie sur la courbe d'adoption de l'innovation :
Courbe d’adoption de l’innovation selon Everett Rogers appliquée à l’IA : novateurs, premiers adoptants, majorité précoce, majorité tardive et retardataires. Le visuel explique qu’adopter l’IA demande du rythme, de la pédagogie et de la patience, avec des étapes clés : définir la valeur ajoutée, guider les utilisateurs, expliquer les bénéfices, encourager le test et former les équipes pour faciliter l’engagement.

  • Identifier les "champions" et co-construire avec eux une liste de cas d'usage, 
  • Accompagner la majorité précoce avec des démonstrations concrètes, des quick wins, des assistants prêts à l'emploi,
  • Former et outiller la majorité tardive avec des bibliothèques d'assistants et des guides pas à pas, 
  • Accepter enfin qu'il restera toujours une part de "résistants" au changement, et que ce n'est pas sur eux qu'il faut concentrer toute l'énergie.
Elle pointe aussi plusieurs erreurs qu'elle aurait aimé éviter : vouloir embarquer tout le monde d'un coup, aller trop vite sans laisser le temps d'apprivoiser la techno, et sous-estimer l'importance du coaching individuel, après tout, chacun n'avance pas au même rythme.

Aujourd'hui, le pôle recrutement de SFEIR utilise l'IA sur une grande partie :
Utilisation de la GenAI chez SFEIR : la génération d’annonces, briefing de poste, stratégie de sourcing, messages d’approche, emails de suivi, scorecards, préparation et transcript d’entretiens, posts LinkedIn et coaching sont assistés par l’IA. En revanche, le tri des candidatures, la préqualification et l’évaluation des candidats restent non automatisés et 100 % humains, avec au moins cinq personnes rencontrées dans le process.
  • Clarification de briefs de poste, rédaction d'annonces, stratégies de sourcing,
  • Séquences de messages et relances personnalisées,
  • Préparation et structuration des entretiens, comptes-rendus, posts LinkedIn, 
  • Auto-coaching des recruteurs et accompagnement des managers.
En revanche, l'IA n'est pas utilisée pour le tri automatique des candidatures ni pour mener des préqualifications : sur des profils très pénuriques, chaque réponse mérite un contact humain direct. SFEIR reste attaché à un process 100% humain côté évaluation (entretiens, pair programming, rencontres multiples).

Point fort de leur approche : l'IA devient aussi un critère d'évaluation des candidats. L'entreprise ne recrute plus de personnes totalement réfractaires à l'IA et cherche au minimum une appétence et une curiosité pour ces outils. Les recruteurs, eux, se positionnent de plus en plus comme coachs des candidats et des managers, et comme stratèges sur les compétences futures et la marque employeur, pensée en mode AI-first. 

Elle résume la transformation en quelques conseils : 

Conseils pour réussir l’adoption de l’IA : commencer soi-même et avec la direction, définir un cadre éthique, identifier les champions internes, construire ses cas d’usage et son stack, laisser du temps à l’acculturation, adapter la pédagogie à la majorité, proposer du coaching individuel et rendre obligatoires certains usages clés.

  • Commencer par soi-même et par la direction, qui doit utiliser l'IA au quotidien pour en percevoir le potentiel,
  • Poser un cadre éthique et RGPD clair avant de déployer l'ensemble,
  • Repérer ses champions, définir les cas d'usage prioritaires et la stack d'outils, 
  • Combiner acculturation, formations collectives, coaching individuel, 
  • Rendre obligatoires certains usages clés une fois qu'il sont maîtrisés (par exemple, l'utilisation systématique d'outils de transcription en entretien).
Selon Vanessa, l'IA ne remplacera pas le recruteur, mais elle oblige la fonction à devenir plus relationnelle, plus stratégique, plus humaine. Moins de pénibilité, plus de temps avec les candidats et les managers, à condition d'accepter d'apprendre, de tester, et de se laisser un peu bousculer.

La révolution IA dans une boite d’intérim : l’histoire de GoJob

Cette slide introduit l’intervention de Guillaume Dietrich, Product Director chez Gojob, venue partager comment l’IA a profondément transformé les opérations d’une agence d’intérim.

Chez GoJob, l’IA a profondément transformé le métier. En trois ans, l’entreprise a :

  • multiplié par 6 le volume de candidatures traitées,
  • multiplié par 15 le nombre de besoins clients adressés,
  • augmenté par 10 la productivité des recruteurs,
    le tout sans augmenter les effectifs.
Schéma du matching Gojob : plus de 80 variables analysées pour recommander le bon candidat, incluant disponibilité, activité sur l’application, certifications et permis, qualification dans les viviers, interactions SMS et email, nombre de missions, complétion du profil, horaires, métiers, compétences, CV et expériences, localisation, distance et réactivité. Illustration avec un CV et deux écrans mobiles affichant des offres d’emploi.

Au cœur de cette performance : un moteur de matching alimenté par plus de 80 variables (CV, historique, interactions, disponibilité…) et un assistant IA, Alpha, capable d’identifier les bons candidats, d’échanger avec eux, de mettre à jour leur profil et d’organiser la mise en relation avec le recruteur.


Contrairement aux craintes initiales, l’adoption côté candidats est excellente : 83 % d’entre eux acceptent volontiers d’échanger avec une IA, avec même de meilleurs taux de réponse lorsque cela est annoncé.


Les réticences sont venues plutôt en interne. GoJob a répondu par de la pédagogie, des formations sur mesure et une promesse claire : l’IA n’a pas vocation à remplacer les recruteurs, mais à augmenter leur rôle.

Slide présentant les défis de l’adoption de l’IA chez Gojob : quiz interactifs pour sensibiliser les équipes, sessions de formation en visioconférence, modules de formation IA et LLM sur mobile, et cours sur les limites et points faibles des grands modèles de langage. L’objectif est de créer du contenu pédagogique et de développer l’expertise interne.

Les gains servent à passer plus de temps en entretien : de 23 minutes en moyenne, les recruteurs sont passés à 36 minutes par candidat.


Exemples d’hallucinations générées par un assistant IA dans des échanges candidats : l’IA invente un deuxième étage pour un rendez-vous, confirme à tort l’existence d’un véhicule de fonction, ou pose une question imaginaire sur l’état d’un vélo. La slide illustre le défi de contrôler et superviser un assistant IA à grande échelle et met en avant le risque d’hallucinations, lorsque le modèle fournit des informations incorrectes ou inventées.

Le principal défi demeure la supervision de l’IA et la gestion des éventuelles hallucinations, un enjeu encore peu couvert par des outils dédiés.


Illustration des principaux défis liés à l’usage de l’IA chez Gojob : messages envoyés aux candidats par un assistant virtuel personnalisé, représentant l’IA au service des recruteurs. À droite, capture d’écran Slack montrant une suggestion d’Alpha, l’assistant IA, que les consultants peuvent valider ou corriger pour améliorer continuellement les réponses. La slide met en avant l’idée d’une IA au service de l’humain et améliorée en continu par les équipes.

En résumé : GoJob démontre qu’une IA bien intégrée peut accélérer l’intérim tout en renforçant l'humain, et non en l’écartant.


Une IA vocale en live : quelles implications pour les entretiens ?

Cette slide introduit l’intervention de Julien Lesaicherre, consacrée aux implications de l’IA vocale en temps réel dans les processus de recrutement.

Pour Julien Lesaicherre, aujourd'hui chez Maki People, le constat est : "Le CV est la pire des méthodes de sélection".

Slide sur les limites du recrutement à grande échelle : le CV est une méthode de sélection peu fiable, seule une minorité de candidatures sont réellement évaluées, les candidats se sentent ignorés ou peu considérés, et les coûts ainsi que les risques augmentent. Présentation visuelle avec quatre encadrés illustrant les principaux défis du recrutement massif.

Dans les recrutements à grande échelle (retail, logistique, customer care, programmes jeunes diplômés...), seuls une minorité de CV sont réellement lus. Les recruteurs traitent les candidatures par ordre d'arrivée, les candidats sont peu ou mal recontactés, les biais humains explosent... et l'IA générative ne fait qu'amplifier le phénomène :
  • Augmentation massive du volume de candidatures,
  • CV "optimisés" par l'IA, donc plus en plus homogènes et difficiles à départager.
La vraie valeur ne se trouve donc plus dans le CV, mais dans l'entretien structuré, centré sur les compétences.
Présentation de Mochi, agent d’IA vocal dédié aux entretiens téléphoniques de présélection. La slide décrit Mochi comme un recruteur virtuel capable de parler 8 langues, disponible 24h/24, 7j/7, pouvant mener des milliers d’entretiens simultanés. Il évalue les compétences administratives, techniques et comportementales, avec un process rapide, juste et sans biais. À droite, un smartphone affiche un appel en cours avec l’agent de présélection.

C'est là que Maki People positionne ses agents d'IA vocale, comme Mochi, un "recruteur" virtuel disponible 24/7, capable de mener des milliers d'entretiens de présélection en parallèle, dans plusieurs langues, avec le même niveau de qualité et de patience pour chaque candidat.

Concrètement, l'agent IA vocale : 
  • Appelle ou rappelle le candidat, 
  • Explique clairement le cadre et la suite du process,
  • Pose un set de questions standardisées (pré-requis, disponibilités, compétences comportementales et parfois techniques),
  • Enregistre et transcrit l'échange,
  • Restitue au recruteur une synthèse exploitable pour décider de la suite. 
L'IA ne disqualifie jamais les candidats. Elle ne remplace pas la décision humaine, elle prépare le terrain en collectant les informations, sans fatigue, ni impatience, et en garantissant que tous les candidats aient une vraie chance d'être entendus. 

Les bénéfices qui ressortent : 
  • Expérience plus équitable pour les candidats (même process pour tous, réponses plus rapides, explications simples),
  • Capacité à absorber des volumes impossibles à gérer manuellement (ex : 700 000 candidatures pour un évènement sportif international en quelques jours),
  • Réduction des coûts et des délais de recrutement, 
  • Meilleure qualité de sélection, car les décisions sont basées sur des compétences observées en entretien, pas sur un CV biaisé.
Après une première expérience, une part des candidats préfèrent l'entretien avec une IA vocale à un entretien humain, notamment pour les profils qui se sentent habituellement discriminés ou peu considérés.

Slide expliquant comment l’IA va offrir des pouvoirs surhumains aux ressources humaines. Les bénéfices mis en avant incluent : efficacité accrue, recruteurs disponibles à la demande, réduction du temps de recrutement, expérience candidat homogène pour tous, et surtout une meilleure qualité des recrutements. Visuel épuré avec encadrés dégradés et message centré sur l’impact de l’IA dans les RH.

À retenir côté recruteurs : 
  • À grande échelle, le tri de CV est un modèle à bout de souffle.
  • L'IA vocale permet de réintroduire la conversation là ou l'on faisait du tri automatique.
  • Elle donne au recruteur des super pouvoirs de volume, tout en le recentrant sur la décision, la relation et la qualité d'expérience. 
  • L'enjeu n'est pas de remplacer l'humain mais de faire en sorte que le temps humain soit consacré aux meilleurs moments du process : échange, feedback, arbitrage, relation long terme. 

Le programme de l'après-midi : Cadre légal, RGPD, retours US & Startups


Programme de l’après-midi du TalentLab Futur : interventions de Guillaume Vigneron sur l’IA et le RGPD, Paul Bachelier sur les tendances du recrutement aux États-Unis, Marion Cosar pour les pitchs startups IA et recrutement, Laurie Guillodo et Sébastien Guérin sur la fresque IA & recrutement, puis performance artistique de la Cie New.

IA & RGPD : peut-on encore recruter sans risque ? 

Slide présentant l’intervention de Guillaume Vigneron, consultant et formateur IA RH, intitulée « IA et droit : peut-on encore recruter sans risque ? ».

Guillaume Vigneron s'est attaqué au sujet qui fait souvent peur : IA, RGPD et cadre légal. Il a proposé une approche à partir de cas pratiques, en s'appuyant sur la pyramide de risques définie par l'AI Act européen. 

Cette pyramide rappelle plusieurs niveaux : 

Schéma des niveaux de risques de l’IA selon l’AI Act appliqué aux ressources humaines : pyramide à quatre niveaux indiquant le risque minimal en bas, les obligations de transparence, le haut risque incluant les systèmes d’IA utilisés dans le recrutement, et le risque inacceptable en haut. Mention d’une vigilance accrue nécessaire dans les RH et d’un pictogramme d’avertissement.

  • Des usages interdits jugés incompatibles avec les valeurs européennes,
  • Des usages d'IA à haut risque, soumis à une vigilance renforcée et le recrutement y figure explicitement, 
  • Des usages à risque plus faible, plus facilement encadrables,

À travers le personnage fictif de Romy, DRH d'un cabinet de chasse, Guillaume passe en revue différents scénarios : 

Slide présentant Romy, DRH fictive de l’entreprise française HunterX spécialisée dans la chasse de talents. Le texte explique qu’elle souhaite recruter avec l’IA en conformité (ChatGPT ou IA interne).

Chaque fois, la question est la même : est-ce légal ? éthique ? conforme au RGPD ? et quelles conditions doivent être réunies pour sécuriser l'usage ?

L'objectif n'est pas de décourager l'innovation, mais de montrer que dans le recrutement, l'IA ne peut pas être déployée en mode "boîte noire". Il faut :
  • Clarifier les finalités
  • Documenter les traitements à haut risque, 
  • Travailler main dans la main avec les juristes / DPO,
  • Intégrer la dimension éthique 
Voici une sélection de cinq cas parmi dix présentés lors de l'événement : 

1️⃣ L'avatar inspiré d'une célébrité
Romy veut intégrer sur son site carrière un avatar inspiré de George Clooney, pour cela elle utilise un service proposé par une société américaine.

Romy peut-elle utiliser cet avatar de George "Cloné" sur son site carrière ? 

Le site cible l'Europe, donc droit français applicable. George Clooney est identifiable : atteinte au droit à l'image (Article 9 - Code civil) Une simple ressemblance suffit pour constituer la violation. 

2️⃣ Copier une offre trouvée sur internet pour la retravailler dans ChatGPT

3️⃣ Analyse des interactions sur les réseaux sociaux croisées avec le vivier candidats
4️⃣ Évaluer l'anglais + analyser stress et émotions
5️⃣ Demander à ChatGPT de choisir entre deux candidats

Guillaume rassure : Oui, il est encore possible de recruter avec de l'IA sans se mettre en danger, mais à condition de sortir du réflexe "on branche un outil magique" et d'adopter une démarche structurée, documentée, assumée. L'Europe ne cherche pas à interdire l'IA, mais à imposer un niveau d'exigence à la hauteur des enjeux humains et sociétaux liés au recrutement. 

J'ai enquêté aux US : voici ce qui nous attend

Cette slide introduit l’intervention de Paul Bachelier, qui partage les enseignements de son enquête menée aux États-Unis sur l’évolution du recrutement à l’ère de l’IA.

Pour Paul Bachelier, le meilleur moyen d'anticiper le futur du recrutement en France, c'est de regarder ce qui se passe déjà aux États-Unis. Non pas parce qu'ils disposeraient de technologies inaccessibles chez nous, les outils arrivent désormais quasiment en même temps des deux côtés de l'Atlantique, mais parce que le mindset y est très différent : l'IA y est abordée comme une opportunité à saisir, pas comme une menace à subir.

Côté contexte, le marché américain n'est pas plus "facile" que le nôtre : baisse de la confiance, des dirigeants prudents, industrie du staffing en léger recul, tensions politiques...

Les fausses certitudes » montrant deux graphiques comparant l’évolution des performances d’employés juniors et seniors dans des entreprises adoptant l’IA versus celles qui ne l’adoptent pas. Le graphique de gauche illustre que les juniors stagnent voire régressent après la sortie de GPT-3.5, tandis que le graphique de droite montre que les employés seniors progressent nettement plus dans les entreprises utilisant l’IA.

En revanche, une tendance est nette : les postes juniors reculent, les postes séniors progressent, notamment depuis l'arrivée de l'IA générative. L'IA ne supprime pas le recrutement, mais elle transforme sur les profils recherchés et les compétences attendues

Graphique en barres intitulé « Des cas d’usage (#1) » montrant les tâches les plus fréquemment réalisées avec l'IA : écriture d’e-mails et de textes (53 %), recherche générale incluant brainstorming et data mining (41 %), recherche de mots-clés et requêtes optimales (33 %), rédaction d’offres d’emploi et descriptions de poste (26 %), contenus marketing tels que blogs et réseaux sociaux (18 %), rédaction ou édition de CV et présentations (12 %), sourcing de candidats (10 %), identification de nouveaux marchés et clients (9 %), présélection et évaluation de candidats (7 %) et engagement candidat (5 %).

Les entreprises américaines ont déjà largement intégré l'IA dans leurs pratiques : rédaction d'annonces et de messages, recherche d'information, préparation d'entretiens...puis, dans un second temps, agents IA et IA vocale pour automatiser des pans entiers du processus (qualification, prise de rendez-vous, suivi, transcription). Les gains de productivité sont réels, même si le marketing exagère parfois les chiffres, et le vrai sujet n'est plus "faut-il utiliser l'IA ?" mais "quel outil choisir, comment l'intégrer et comment mesurer son impact ?".

Enfin, Paul insiste sur un point : le différentiel ne se joue plus sur la technologie, mais sur la capacité à se réinventer. Ce ne sera pas l'IA qui remplacera les professionnels du recrutement, mais bien les recruteurs qui maîtrisent l'IA qui prendront l'avantage sur ceux qui restent à l'écart.

Pitchs Startups IA & Recrutement : 5 outils, 5 visions du futur

Cette slide introduit la séquence « Pitches Startups – IA et Recrutement » animée par Marion Cosar.
  • Animé par Marion Cosar (Directrice générale, LEDR - L'École Du Recrutement)

Marion Cosar a introduit cette séquence de pitchs en rappelant un point clé : L'IA renforce l'illusion que "recruter, c'est facile". Taper une requête, obtenir une réponse correcte et rapide...et se contenter du moyen. Or, pour elle, le rôle des recruteurs et recruteuses est justement d'être meilleurs que la machine : experts du métier, capables de challenger, recadrer et corriger les propositions de l'IA. L'IA n'est pas un raccourci, mais un miroir de nos compétences : si l'on ne sait pas recruter, elle ne fera que refléter nos limites

Ensuite, sur scène, cinq startups sont venues avec en fil rouge un même message : ces technologies peuvent réellement faire gagner du temps et de la qualité, à condition de garder son esprit critique, de rester aux commandes...et de ne pas laisser l'IA faire le métier à la place du recruteur.

Dans ce contexte, les 5 startups sont venues pitcher leur vision du futur du recrutement assisté par l'IA, en 2min chrono :
« Startup n°1 » présentant Kalent - Startup fondée par Édouard Vaudour
  • Kalent : Un copilote IA pour l'approche directe, pensé pour générer rapidement des entretiens qualifiés grâce à une approche multicanale (email, whatsapp...). La plateforme s'appuie sur un vivier massif de profils enrichis et propose des séquence d'approche optimisées, tout en garantissant une utilisation conforme au RGPD.
Startup n°2 » présentant Omogen.ai, Paul Lagrange représentant de la startup
  • Omogen.ai (Agent vocal "Alex") : Un agent IA vocal spécialisé dans la préqualification, intégré directement à l'ATS, "Alex" appelle les candidats, pose les bonnes questions, collecte et structure les informations et libère du temps aux recruteurs. Cet agent permet de traiter des volumes de candidatures autrement impossibles à gérer manuellement.
Shortlist AI représentée par Dawid Hillien
  • Shortlist AI : Une IA conçue pour analyser, classer et prioriser automatiquement les candidatures afin de générer en quelques secondes une véritable short-list exploitable. L'outil interprète les compétences, les expériences et les signaux faibles pour faire émerger les meilleurs profils, tout en laissant le recruteur décisionnaire.
Startup n°4 - Bamboo - représentée par Antoine Barré
  • Bambboo : Une solution centrée sur la cooptation et l'activation de réseaux, qui permet d'identifier et mobiliser facilement les talents issus de son écosystème. La plateforme qui automatise une bonne partie de la mécanique de relance, suivi et animation pour maintenir l'engagement des collaborateurs et référents. 
Startup n°5 - Noota représentée par Alexandre Duffaut, le CEO.
  • Noota : Un assistant IA dédié aux entretiens, capable d'enregistrer, transcrire, analyser et structurer les échanges, afin de produire des comptes rendus exploitables et d'aider à objectiver les décisions grâce à une analyse homogène des réponses, et réduit la charge administrative des recruteurs.

Fresque IA & Recrutement : cartographier les usages qui vont tout changer

Cette slide introduit la Fresque du recrutement & de l’IA, présentée comme une cartographie participative inédite.

Pour terminer la journée, Laurie Guillodo et Sébastien Guérin ont proposé une fresque IA & Recrutement en live, avec tous les participants. 

Une fresque collaborative : imaginer ensemble le rôle du recruteur de demain et comment s’y préparer.
Objectif : Cartographier les principaux cas d'usage de l'IA tout au long du processus de recrutement, puis les prioriser selon leur impact potentiel à l'horizon 2026. 

Quatre grandes étapes du recrutement :
  • Expression du besoin : La priorité, c'est la cartographie des compétences en temps réel et la mobilité interne. Autrement dit, mieux savoir de quoi on dispose déjà avant de lancer un recrutement externe.
  • Sourcing : Deux usages arrivent ex aequo : 
    • la candidature par compétences / potentiel (et donc la mort progressive du CV)
    • et l'activation / animation intelligente des viviers : le sourcing multicanal automatisé reste important, mais n'est plus considéré comme le seul levier critique. 
  • Évaluation : La préqualification automatisée est jugée comme le cas d'usage le plus structurant à court terme, loin devant les vérifications administratives ou la conformité, pourtant très visibles dans les discours. 
  • Décision et intégration : C'est l'on-boarding personnalisé par profil et par poste qui écrase tout le reste. La salle imagine clairement un futur où l'intégration sera beaucoup plus fine, progressive et adaptée à chaque personne. 

La fresque s'est terminée sur une question ouverte : À quoi ressemblera vraiment le recrutement de demain ? 
Conclusion – Quel scénario est le plus plausible selon vous ?

1. Un recrutement machine à machine(l'IA de l'entreprise VS l'IA du candidat ?)
2. Un recruteur "cyborg", déchargé de 80% des tâches opérationnelles.
3. Un modèle Human First, où l'IA automatise le fond de toile, mais où la vraie différenciation reste la relation, l'écoute et l'accompagnement. 

La salle s'est partagée entre le scénario 2 et 3, preuve que tout le monde voit bien l'IA prendre sa place dans les processus mais sans renoncer à l'humain au centre.

Conclusion

La première édition du TalentLab Futur a donné un aperçu de ce qui attend la fonction recrutement dans les prochaines années. À travers différents regards, une même idée s'est imposée : l’IA ne vient pas remplacer le recruteur, elle redéfinit son périmètre, son impact et sa valeur ajoutée.


Les intervenants l’ont montré chacun à leur manière : l’IA n’agit pas comme un substitut, mais comme un multiplicateur. Elle accélère les tâches répétitives, clarifie les informations, propose des options, sécurise les process et fluidifie la relation avec les candidats. Elle libère du temps, mais surtout, elle oblige chaque professionnel à revisiter sa manière de travailler : challenger ses habitudes, renforcer sa posture de coach, de stratège et de facilitateur.


Cette transformation ne se limite pas aux outils. C’est une transformation culturelle. Une évolution des compétences, du mindset et de la façon d’aborder la complexité, la donnée, et même la créativité. Les organisations qui en tireront parti seront celles qui verront l’IA non comme un automatisme à ajouter, mais comme un levier à orchestrer intelligemment.


Et si cette journée révèle quelque chose, c’est bien que la valeur du métier ne disparaît pas : elle se déplace.
Elle quitte le terrain du “faire” pour rejoindre celui du “penser”, du “relier” et du “décider”.
Elle passe de la saisie manuelle à l’analyse, de la relance automatique à l’accompagnement, du tri de CV à l’évaluation des compétences.


Le TalentLab Futur ne cherchait pas seulement à prédire l’avenir. Il a montré quelque chose de plus essentiel : cet avenir se construit déjà, chaque jour, par celles et ceux qui choisissent d’apprendre, d’expérimenter et d’avancer avec l’IA plutôt que contre elle.


L’IA… mais pas que.

C’est encore l’humain qui donne du sens, qui arbitre et qui crée la valeur. Le véritable futur du recrutement dépendra surtout de la capacité des professionnels à apprendre, à s’adapter et à collaborer différemment.


Pour plus de lecture


➡️ TalentLab 2025 : Les 4 tendances clés du recrutement de demain

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