Le premier recruteur… et le premier jobboard de France ?

En lisant l’histoire de Théophraste Renaudot, j’ai eu un déclic.
Et si le tout premier recruteur “moderne” de France n’était ni militaire, ni noble, ni industriel… mais un médecin-journaliste du XVIIᵉ siècle ?

Nous sommes à Paris, en 1630.
Louis XIII règne, Richelieu gouverne, et le peuple, déjà, cherche du travail. Les petites annonces se passent encore de bouche à oreille, dans les tavernes ou par l’intermédiaire d’un parent bien placé. Il n’existe aucun lieu où les offres et les demandes se croisent de façon structurée.

C’est dans ce contexte que Renaudot, alors médecin des pauvres, imagine un dispositif inédit : le Bureau d’adresse.


Le Bureau d’adresse : ancêtre de l’agence… ou du site emploi ?

Installé rue de la Calandre, ce bureau a un objectif simple mais ambitieux : mettre en relation des personnes qui ont un besoin avec celles qui peuvent y répondre.
Cela concerne les malades et les soignants, les enseignants et les familles… mais aussi — et surtout — les employeurs et les chercheurs de travail.

Pour 3 sous, chacun peut déposer une annonce ou consulter celles déjà disponibles.
On y trouve des propositions de travail manuel, de compagnonnage, de services domestiques, mais aussi d’emplois plus qualifiés. Les annonces sont consignées, centralisées, organisées. Renaudot et ses assistants s’assurent de la cohérence et du sérieux des offres.

À l’échelle du XVIIᵉ siècle, c’est une révolution de la mise en relation professionnelle.


Recrutement, intermédiation, monétisation : tous les codes y sont

Ce qui frappe, en relisant les écrits autour de cette époque, c’est à quel point le Bureau d’adresse préfigure notre modèle actuel du jobboard :

  • des offres accessibles à tous ;
  • un accès payant, mais modique, des deux côtés de la chaîne ;
  • une mission d’intermédiation neutre ;
  • une base de données d’annonces disponibles, avec des correspondances possibles.

La logique de "matching" est déjà là, de façon artisanale. Théophraste Renaudot ne cherchait pas à créer une entreprise, mais à résoudre un problème de société : faire se rencontrer besoins et >compétences.

L’héritage oublié d’un pionnier

Renaudot est aujourd’hui surtout connu pour avoir fondé La Gazette, premier journal officiel en France. Mais son rôle dans la structuration du marché de l’emploi urbain mérite tout autant d’être souligné.

Dans un Paris encore très cloisonné socialement, son bureau offrait une forme d’égalité d’accès à l’information. Il démocratisait, en un sens, l’emploi et l’utilisabilité du réseau.

On pourrait presque dire que Renaudot, sans le savoir, a inventé :

  • recruteur indépendant (lui-même) ;
  • cabinet de placement (le Bureau d’adresse) ;
  • jobboard avant Internet, où l’information circulait… sur papier.

Une inspiration pour les recruteurs d’aujourd’hui ?

Ce regard en arrière n’est pas qu’anecdotique. Il nous rappelle que :

  • la mise en relation est un besoin universel et ancien ;
  • la transparence de l’offre est un facteur de progrès social ;
  • la technologie n’est qu’un moyen — l’enjeu est toujours humain.

En relisant l’histoire de Renaudot, je me suis demandé :
Et si le futur du recrutement résidait moins dans les outils que dans l’intention initiale de ceux qui les créent ?


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